Décryptage
Texte: Texte : Elena Martinez, IHM
Photo: iStock

Nous sommes tout.x.e.s des êtres de désir

RECHERCHE Dans ce « Labo des humanités », In Vivo vous fait découvrir un projet de recherche de l’Institut des humanités en médecine (IHM) du CHUV et de la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL.

L’histoire des conceptions sur le genre et le sexe montre une intrication complexe entre les valeurs sociales et les données émanant de la biologie et de la physiologie. Vincent Barras, historien de la médecine et directeur de l’Institut des humanités en médecine CHUV-UNIL, explique : « Ce qui, à une époque donnée, a pu passer pour évident – la ‹ supériorité › d'un sexe sur l'autre par exemple – , ne l'est pas à d'autres moments du fait de conceptions scientifiques changeantes, mais surtout, du fait de valeurs culturelles ou sociales qui pèsent de tout leur poids sur les esprits et les comportements. »

L'avènement, au cours du XIXe siècle, d'un ordre politique et social où le rôle de la médecine est central a eu tendance à « pathologiser », à ranger du côté de l'anormal, du « devant être soigné », toute une série de personnes et de situations dont le classement dans un genre bien défini (identifié alors au sexe biologique, masculin ou féminin) était ambigu. Des comportements comme l'homosexualité, ou encore la « transsexualité » (terme utilisé alors), autant que des conformations corporelles comme l'« hermaphrodisme », ont été considérés comme pathologiques et, dès lors, classés comme « maladies » qu'il revenait à la médecine et à la psychiatrie de traiter. « Ce n’est que très récemment que le système médical est revenu sur ces conceptions et ces pratiques, envers lesquelles on commence à prendre – et pas encore de façon complète à mes yeux – , un peu de recul critique. »

Vincent Barras s’est personnellement intéressé à ces questions, au contact de personnes concernées ou en souffrance de genre. « Ces êtres humains m'ont fait comprendre par leur parcours de vie et les difficultés rencontrées, notamment face à l'institution médicale, combien la question de l'identité de genre pouvait être largement plus complexe et plus riche que la réduction à une simple dichotomie homme-femme. Je participe au conseil de fondation d'Agnodice, qui mène dans le canton de Vaud et en Suisse romande une action véritablement pionnière pour que cette question soit mise à l'agenda social, politique et médical. »

S'interroger sur l'identité de genre soulève des questions anthropologiques et philosophiques fondamentales, explique Vincent Barras, « sur ce que nous sommes et faisons ensemble en tant qu'humains. Des questions qui relèvent autant de la compétence des humanités en médecine, des professionnelles de la santé que de toutxe unxe chacunxe ! » /

/ Lire aussi en notre dossier sur la transidentité



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Vincent Barras

Historien et directeur de l’Institut des humanités en médecine CHUV-UNIL, il livre dans une interview quelques réflexions sur la question de l’identité de genre.