Health Valley
Texte: Audrey Magat
Photo: Heidi Diaz - Service d'appui multimédia (SAM)

Intégrer la médecine connectée à l’hôpital

Ingénieurs et médecins s’allient pour imaginer des traitements basés sur les nouvelles technologies. Un des défis: sécuriser les données.

Analyse biométrique par les veines du poignet ou capteurs de la maladie d’Alzheimer sur smartphone: les nouvelles technologies et le monde hospitalier se développent en symbiose aujourd’hui. Preuve que la Suisse romande prend cette évolution au sérieux, le Biopôle d’Épalinges a inauguré en 2018 son Digital Health Hub, un centre d’innovation entièrement dédié à la santé numérique. Économiquement, l’industrie suisse de la medtech s’affirme comme une des plus importantes du monde avec 1’400 entreprises et 15,8 milliards de francs de chiffre d’affaires en 2018.

Néanmoins, l’intégration des nouvelles technologies se heurte encore à quelques obstacles, comme l’explique Philippe Ryvlin, chef du département des neurosciences cliniques du CHUV: «Les ingénieurs créent des dispositifs médicaux novateurs dont il est nécessaire d’évaluer rigoureusement l’impact clinique avant leur mise sur le marché.» Le médecin est depuis 2016 directeur de la plateforme Neurotech qui accompagne les laboratoires de recherche et les entreprises dans le développement et la validation des neuro-technologies. Jusqu’à présent, la plateforme a accompagné le développement de quatre produits issus des start-up Empatica, DomoSafety, SwissCustom Watches et Gondola, ainsi que des innovations de l’EPFL.

Pour Thierry Weber, médecin et CEO de Vivactis, une agence de communication spécialisée dans le domaine médico-scientifique basée à Épalinges, «les appareils connectés peuvent répondre aux problématiques d’avant et d’après l’hospitalisation. Ces dispositifs peuvent par exemple aider les patients à prendre leurs médicaments ou à suivre leur maladie à domicile, ce qui permettrait de diminuer les consultations de contrôle.»

Prévention améliorée

Les équipes académiques de Neurotech travaillent notamment avec la réalité virtuelle ou les jeux sérieux («serious games» en anglais) pour aider à la réhabilitation et à la rééducation, par exemple après un AVC. Elles développent aussi des capteurs connectés capables de détecter préventivement des atteintes neurologiques. Le bracelet Embrace d’Empatica, ou le patch fixé sur le biceps de Brain Sentinel Speac, aujourd’hui certifiés et commercialisés, permettent par exemple de détecter des crises d’épilepsie convulsives. «Ces produits ont un grand potentiel prédictif, ajoute Philippe Ryvlin. Notre objectif est de les intégrer dans la pratique hospitalière, mais surtout dans le suivi des patients à leur domicile, notamment pour ceux souffrant d’affections chroniques afin de réduire leur handicap, d’accroître leur autonomie et ainsi leur qualité de vie.»

Ces plateformes médicales connectées soulèvent toutefois la question de la sécurité des données. Ainsi, la société allemande Greenbone Networks qui teste la sécurité informatique des hôpitaux à l’échelle mondiale exposait cette année les résultats de son enquête: 24 millions de dossiers patients seraient vulnérables dans le monde alors qu’en Suisse, le nombre d’images médicales non sécurisées s’élèverait à 230’000. La récupération de ces données pourrait alors entraîner la monétarisation des données de santé, ou encore leur récupération par des assurances maladie. «Chez Neurotech, nous utilisons le système de cybersécurité de pointe du CHUV, rassure Philippe Ryvlin. Les données des patients sont sécurisées, tout comme leur transfert, leur stockage et leur partage de manière anonyme.»



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Photo ci-dessus:

Embrace permet de détecter des crises d'épilepsie.