Texte: Chloé Thomas-Burgat
Photo: Jeanne Martel - Service d'appui multimédia (SAM)

Ça se passe à Lausanne

La capitale vaudoise est aujourd’hui un pôle de recherche oncologique reconnu à l’échelle européenne. Les travaux en immunothérapie cellulaire avancent rapidement et laissent entrevoir une percée historique. Récit d’un travail d’équipe, avec George Coukos.

Certains qualifient la région lémanique de Health Valley, en écho à la fameuse Sillicon Valley, pour ses qualités uniques en terme d'innovation dans le domaine de la santé. Et c'est en partie grâce à ce terreau fertile que George Coukos, oncologue de renom, a décidé de poser ses valises dans la capitale vaudoise.

«À mon arrivée, j’ai découvert un hôpital extrêmement structuré, avec des ressources importantes et une réelle motivation à l’innovation. Les compétences en bio-ingénierie et en informatique de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) m’ont aussi beaucoup impressionné», se souvient celui qui dirige aujourd'hui le Département d'oncologie UNIL CHUV.

Jusqu'en 2012, le Professeur œuvrait à l’Université de Pennsylvanie, où il avait notamment créé un prestigieux centre de recherche sur le cancer de l’ovaire. Installé aux États-Unis depuis plus de vingt-ans, il n’avait aucune raison de partir. Mais l’envie de développer un centre de recherche pointu en Europe l’a poussé à changer de latitude.

Au service de l'intelligence collective

Depuis son arrivée il y a sept ans, le «paysage oncologique» lausannois a avancé à pas de géants. Ceci notamment grâce à l’apport financier considérable du Ludwig Institute for Cancer Research, qui s’est engagé à soutenir Lausanne sur une période de trente ans, alors qu’il avait initialement prévu de recentrer ses activités aux États-Unis.

«Aujourd’hui, nous pouvons dire sans rougir que nous sommes l’un des plus grands centres de recherche contre le cancer en Europe», se réjouit le Prof. George Coukos.

Inauguré en 2018, le bâtiment Agora fait foi. À terme, ce nouveau centre de recherche sur le cancer doit réunir près de 300 chercheurs de l’EPFL, des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), de l’Université de Genève (UNIGE), de l’Université de Lausanne (UNIL), du Ludwig Institute for Cancer Research et du CHUV.

Financé par la Fondation de soutien à la recherche sur le cancer (ISREC), il traduit deux symboles forts selon George Coukos: «D’une part la volonté de la communauté publique d’avancer dans la recherche, car ce sont les citoyens qui ont apporté les fonds nécessaires au financement d’AGORA par l’ISREC, et d’autre part l’existence d’une véritable culture de la collaboration en Suisse, ce qui permet d’avancer vite et efficacement. Aux États-Unis, de prestigieux centres travaillent les uns à côté des autres, mais en concurrence et pas ensemble».

(Photo: Mathieu Gafsou) Le bâtiment Agora est structuré en plusieurs zones inter-connectées où sont traitées en priorité les thématiques suivantes: le mélanome, le glioblastome (la forme la plus mortelle du cancer du cerveau), les cancers du poumon, du sein, du pancréas et de la prostate, l’invasion et la métastatisation (l’étude de la migration des cellules malignes) et l’angiogenèse (un processus pathologique dans la croissance des tumeurs et le développement des métastases).

Le mélanome métastatique mis à mal

La clinique n’est pas en reste et les spécialistes ont désormais plusieurs armes solides pour lutter contre, voire éradiquer les cancers. De la radiothérapie flash à l’immunothérapie cellulaire, près de 60 études cliniques sont en cours sur le site du CHUV. «Tout s’accélère et nous allons bientôt pouvoir constater les résultats de ces années de recherche», s’enthousiasme George Coukos, qui se dit particulièrement fier de l’essai ATATIL:

«Ce projet est 100% lausannois. Les recherches, les traitements, les essais: tout est fait ici!»

Vous souhaitez en savoir plus sur cet essai prometteur? À travers notre série Immersion, nous vous proposons d’entrer dans les coulisses du CHUV et de découvrir, en suivant le chemin d’un patient, comment la thérapie cellulaire va peut-être révolutionner le traitement du cancer dans les années à venir. /



Profil

Diplômé en médecine à l'Université de Modène et de Reggio d'Émilie, puis à l'Université de Pennsylvanie, George Coukos a contribué à de nombreuses découvertes scientifiques significatives en lien avec l'immunothérapie et les thérapies cellulaires, dont le premier vaccin personnalisé pour les femmes atteintes d'un cancer ovarien. Sa recherche se centre sur ce dernier, ainsi que sur le micro-environnement tumoral. Nommé personnalité de l'année 2018 pour la science par la rédaction de Bilan Luxe/Finanz und Wirtschaft, il est chef du Département d'oncologie UNIL-CHUV et directeur de la branche lausannoise du Ludwig Institute for Cancer Research.

11'500

/

Surface en m2 de l'édifice Agora, conçu par le bureau Behnisch Architekten et financé par la Fondation ISREC.

300

/

Nombre de médecins, chercheur-euse-s et bio-ingénieurs réunis au sein d'Agora, issus des 6 institutions partenaires: l'Université de Lausanne (UNIL), l'Université de Genève (UNIGE), l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), le CHUV, les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et l'Institut Ludwig.

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