Dossier
Texte: Propos recueillis par Sylvain Menétrey
Photo: Heidi Diaz (SAM)

Bouger aide à la guérison

Éviter l’alitement des patients est l’une des recommandations les plus visibles de Smarter Medicine. Elle permet de réduire le risque de complications et favorise le maintien de l’autonomie.

L'alitement était préconisé durant tout le XIXe siècle pour une multitude d’affections. Ce n’est que depuis la seconde moitié du XXe siècle que nous reconnaissons à l’hospitalisation des effets délétères. Aujourd’hui, favoriser la mobilité des patients hospitalisés passe cependant par d’importants changements. Des plus pratiques comme une meilleure ergonomie des chambres jusqu’aux plus profonds, qui touchent à la culture hospitalière. Marie Méan fait partie d’un groupe de recherche en médecine interne du CHUV qui vise à obtenir une image précise du niveau de mobilisation des patients hospitalisés.

Quels sont les objectifs de votre étude?

Nous manquons d’indicateurs qui concernent le système de santé suisse au sujet de la mobilisation des patients. À travers l’étude Next Step, nous voulons lever ces inconnues et déterminer le niveau d’activité physique des patients de plus de 65 ans hospitalisés. Nous observons ainsi environ 200 patients du service de médecine interne. Pendant tout leur séjour, ils portent un bracelet qui enregistre leurs mouvements. Nous corrélerons ensuite le niveau d’activité physique à de potentielles complications intra-hospitalières, telles que les escarres ou les chutes, ainsi qu’au devenir des patients à la sortie de l’hôpital et à leur niveau d’autonomie. À partir de ces résultats, nous souhaitons créer un programme de mobilisation qui sera testé en 2019.

Pourquoi l’alitement est-il déconseillé?

Dès le premier jour, l’inactivité physique liée à l’alitement en milieu hospitalier est probablement le facteur contribuant le plus au déclin fonctionnel, surtout chez les patients âgés. Ainsi, la perte d’indépendance dans les activités de la vie quotidienne (se laver, manger, téléphoner, etc.) à la suite d’une hospitalisation est trois fois plus élevée chez des patients âgés de 90 ans ou plus, en comparaison de ceux âgés de 70 à 74 ans.

Pourquoi n’en prend-on conscience que maintenant?

Pendant cinquante ans, les hôpitaux se sont focalisés sur le risque de chute, qui était un indicateur de qualité des soins. Or, ce risque augmente chez les patients déconditionnés. Nous devons donc changer d’optique, et enseigner à tous les corps de métier comment évaluer et maintenir une mobilisation.

Comment s’allier les patients?

C’est un défi! Nous cherchons à les informer des bienfaits de la mobilisation pour contourner les réticences liées à la douleur et à la fatigue. Nous avons développé la brochure Bouger aide à la guérison, avec des vignettes indicatives pour que les patients puissent se situer dans leur capacité à se mobiliser. Personnellement, j’aime verbaliser les objectifs: «Si nous vous stimulons à vous mobiliser, c’est pour préserver votre autonomie et favoriser votre retour à domicile.»



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Marie Méan est médecin associée au service de médecine interne du CHUV, maître d’enseignement et chercheuse clinicienne.